Céline Pasteur

le sensualisme

Manifeste pour le Sensualisme

Ce mouvement factuel animé par Jean-Yves Guionet s’est placé sous la bannière philosophique du sensualisme, une philosophie influencée par l’empirisme.
C’est la connaissance par les sensations. En opposition au rationalisme cartésien.
Le sensualisme affirme qu’il n’y a pas d’idées innées. Sensations et connaissances sont coexistantes. Toute connaissance, toute réflexion, tout acte d’imagination n’est qu’une sensation mémorisée, modifiée, associée ou comparée à d’autres.
Les nouveaux acquis des sciences cognitives nous ont montré que toute activité humaine est une expérience incarnée (ce qui est un défi aux anciennes visions de la conscience fondée sur la foi et la raison).
Le regard rétinien ne capte que les vibrations lumineuses. C’est une vision fragmentée qui entretient notre mémoire émotionnelle, sensible (habituellement doublé par le regard intelligible qui fabrique la vision). Tandis que le regard cognitif rend compréhensible ce que nous voyons. Il aime l’intelligible, la simplification, l’harmonie, le décoratif.

Comment étendre la peinture incarnée, la peinture libre la peinture de l’émotion ?

Le sensualisme est un véritable manifeste en faveur d’un monde artistique mieux équilibré, plus sensible et moins rationnel. Il se veut un plaidoyer ardent en faveur d’une pratique artistique fondée sur l’émotion.
Un apprentissage créatif ajusté au plus près des sensations. L’enjeu du peintre sensualiste est d’accéder à ses territoires intimes. Il lui faut s’émanciper de la domination du regard intelligent. Éviter la domination imaginaire, conceptuelle et formelle. Et favoriser l’imaginaire matériel. Celui qui trouve la source de ces créations dans l’intimité de la matière. La peinture, grâce à la manipulation de la matière, permet cette intériorisation.

Le travail de la matière n’est pas que accumulation de matière ou d’effet d’empâtements. Il consiste à harmoniser en différents effets des textures obtenues souvent de façon aléatoire voire accidentelle. L’artiste ne propose pas une image de ses pensées, se ses sentiments. Pensées, sentiments, issus de la mémoire consciente, du cognitif.

Créer, c’est accéder par intériorisation, dans l’action présente, à des territoires intimes. C’est par processus que le peintre conduira le spectateur, par empathie, « à faire tableau » (Marcel Duchamp). Empathie, capacité de déceler l’émotion à travers les signes qui font sens pour tous les humains. C’est le processus par lequel un observateur se projette dans les objets qu’il perçoit.

« Le tableau ne se réalise pas par miracle, mais à travers une enchaînement complexe de gestes, de ruptures, de subtiles ou cruelles décrois, de ratures et de superpositions, conduisant inexorablement à son inachèvement achevé. » Antonio Saura

La véritable création — l’œuvre d’art qui procure des émotions t développe notre imaginaire — est la réalisation d’une intelligence sensible, construite par les émotions, que le corps par ses recherches fabrique. Où le corps et l’esprits sont associés. Sans le corps qui produit du sensoriel, sans nos sens qui ourdissent notre intelligence, il n’y a pas de création.

Je cherche l’harmonie dans le vrai, l’authentique, avant le beau. L’image finale d’une peinture peut être belle, intelligible ou décorative. Cependant la réalisation de l’art n’est pas issues d’idées, ni de la raison, mais du chaos, de l’abîme, auquel il donne forme. La forme, c’est le fond qui monte à la surface…